[Textes] Loi de modernisation sociale : présentation du volet économique
La consécration du droit au reclassement (fiche n° 2)

par Marie Dominique Dubrac, Juriste en droit social

La loi de modernisation sociale, dans son volet relatif aux licenciements économiques, consacre la jurisprudence sur l'obligation de reclassement préalable à tout licenciement économique. Le droit au reclassement a désormais un fondement légal et est renforcé par le nouveau texte.

1) L'obligation de reclassement préalable à la décision de licenciement reconnue légalement (obligation de moyen)

La jurisprudence de l'obligation de reclassement est définitivement confirmée et précisée (nouvel alinéa 3 de L. 321-1 du Code du travail) :

- les tentatives de reclassement interne avant tout licenciement économique constituent désormais un préalable obligatoire (dans l'entreprise ou le groupe). Le licenciement doit être la décision ultime ;
- la notion de reclassement interne est précisée. Il s'agit d'emploi relevant de la même catégorie ou emploi équivalent ; à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, d'emploi de catégorie inférieure. Le cadre du reclassement est l'entreprise ou le groupe ;
- les offres de reclassement doivent être écrites et précises.

Remarques de l'expert

Dans le nouveau texte, le reclassement est conçu comme une obligation de moyen préalable à la mise en oeuvre du licenciement, mais n'est pas un élément de la définition du motif économique.
Il confirme que le licenciement doit être l'ultime mesure.
Il est à noter que le texte distingue nettement les exigences de formation, d'adaptation et de reclassement.

2) Le congé de reclassement, une nouvelle obligation de moyen, préalable au licenciement économique

La loi de modernisation sociale met en place un congé de reclassement, présentant un certain nombre de caractéristiques :

- il est applicable aux entreprises, établissements, groupes de dimension nationale ou communautaire d'au moins 1000 salariés ;
- l'employeur est tenu de proposer des actions de formation pour le reclassement et les prestations d'une cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi ;
- il est financé par l'employeur pendant une durée maximale de 9 mois ;
- le salarié est rémunéré (montant différent selon que le congé se déroule pendant le préavis ou au-delà de cette période) ;
- peu importe que le licenciement soit individuel ou collectif, aucune condition d'âge ou d'ancienneté n'est requis pour le salarié.

Remarques de l'expert

Le mot "congé" crée une ambiguïté, cette nouvelle mesure s'apparentant plutôt à l'ex-convention de conversion.

3) Le dispositif pré-PARE, une nouvelle obligation de moyen, préalable au licenciement économique

Un dispositif pré-PARE doit être mis en place avant tout licenciement :

- il est applicable aux entreprises, établissements ou groupes de dimension nationale ou communautaire de moins de 1000 salariés ;
- l'employeur est tenu de proposer des mesures d'évaluation des compétences professionnelles et d'accompagnement en vue du reclassement (à défaut, il est tenu au versement d'une contribution à l'ASSEDIC égale à un mois de salaire brut moyen des 12 derniers mois travaillés) aux salariés ayant au moins 4 mois d'ancienneté ;
- la proposition pré-PARE doit figurer dans la lettre de licenciement ;
- ces mesures sont mises en oeuvre pendant la période du préavis.

Remarques de l'expert

Ce nouveau dispositif s'applique à toute entreprise puisqu'aucun effectif minimal n'est requis.

4) Le plan de sauvegarde de l'emploi (ex-plan social)

Le plan social est remplacé par un plan de sauvegarde de l'emploi :

- les garanties des salariés sont renforcées : élargissement de la liste des actions de sauvegarde de l'emploi, modification du montant de l'indemnité de licenciement pour motif économique ;
- la validité du plan est appréciée en fonction des moyens de l'entreprise ou du groupe ;
- si la nullité du licenciement est prononcée, il y a obligation de réintégration du salarié s'il en fait la demande ; s'il n'en fait pas la demande, l'employeur est tenu au versement d'une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 12 derniers mois.

5) L'ordre des licenciements : suppression du critère des qualités professionnelles

Désormais, seuls les critères sociaux, appréciés par catégories professionnelles, devront être pris en compte pour fixer l'ordre des licenciements .

Remarques de l'expert

La réponse apportée par l'un des arrêts Samaritaine (Cass. soc. 13 février 1997, n° 95-16.648, N° Lexbase : A1924ACA) est utile pour préciser cette notion. Elle "concerne l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune".


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