Cass. soc., 24-01-2007, n° 05-40.639, F-D, Cassation



SOC.PRUD'HOMMES L.G.

COUR DE CASSATION

Audience publique du 24 janvier 2007

Cassation

Mme MAZARS, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président

Arrêt n° 89 F D

Pourvoi n° B 05-40.639

Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme Z.

Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 22 septembre 2005.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par Mme Sylvie Z, domiciliée Le Pontet,

contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2004 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Omnium de gestion et de financement, société anonyme, dont le siège est Paris,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2006, où étaient présents Mme Mazars, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Marzi, conseiller rapporteur, M. Trédez, conseiller, Mme Capitaine, conseiller référendaire, M. Maynial, avocat général, Mme Mantoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Marzi, conseiller, les observations de la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de Mme Z, de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de la société Omnium de gestion et de financement, les conclusions de M. Maynial, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique

Vu l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 120-4 du code du travail ;

Attendu que Mme Z, au service de la société Omnium de gestion et de financement depuis le 10 octobre 1984, y exerçait en dernier lieu, selon avenant à son contrat de travail du 28 avril 1995, des fonctions de vendeuse dans une agence de pompes funèbres située à Valenciennes ; qu'au cours de son congé parental d'éducation, prenant effet le 1er janvier 2000 et dont le terme était fixé, après renouvellement, au 11 mai 2002, la salariée a sollicité sa mutation dans la région d'Avignon où son concubin avait été muté le 18 juin 2001 ; que l'employeur lui ayant fait savoir qu'aucun poste correspondant à sa qualification n'était disponible, Mme Z, au terme de son congé, s'est néanmoins présentée dans une agence d'Avignon pour y reprendre ses fonctions ; que n'ayant pu obtenir satisfaction, la salariée a refusé d'aller occuper son poste à Valenciennes malgré l'injonction de son employeur ; qu'elle a été licenciée pour faute grave, par lettre recommandée du 26 juin 2002 lui reprochant son abandon de poste ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour demander paiement de ses indemnités de rupture et de dommages-intérêts ;

Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt attaqué énonce que l'obligation de bonne foi du contrat de travail n'impliquait pas, nonobstant les contraintes familiales de l'intéressée, l'obligation pour la société Omnium de gestion et de financement de proposer à Mme Z les postes disponibles sur la région d'Avignon ; que la décision de licenciement pour faute grave qui se réfère à un abandon de poste caractérisé ne saurait être considérée comme illégitime au motif que l'employeur ne justifie d'aucun élément objectif propre à l'empêcher de proposer ces postes disponibles à Mme Z ;

Qu'en statuant ainsi, sans expliquer les raisons objectives qui s'opposaient à ce que l'un des postes disponibles dans la région d'Avignon soit proposé à la salariée, contrainte de changer son domicile pour des raisons familiales sérieuses, alors, de surcroît, que la décision de l'employeur informé depuis plusieurs mois de cette situation, de maintenir son affectation à Valenciennes, portait atteinte de façon disproportionnée à la liberté de choix du domicile de la salariée et était exclusive de la bonne foi contractuelle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 décembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne la société Omnium de gestion et de financement aux dépens ;

Vu les articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Omnium de gestion et de financement à payer à la SCP Baraduc et Duhamel la somme de 2 500 euros, laquelle renonce à percevoir l'indemnité versée par l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille sept.