SOC.PRUD'HOMMESI.K.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 juillet 2005
Cassation partielle
M. BAILLY, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président
Arrêt n° 1622 F D
Pourvoi n° P 03-44.368
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Stéphane Z, demeurant Saint-Malo,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 mai 2003 par la cour d'appel de Rennes (5e chambre Prud'homale), au profit de la société Laboratoires Schwarz Pharma, société anonyme, dont le siège est Boulogne-Billancourt,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 juin 2005, où étaient présents M. Bailly, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Funck-Brentano, conseiller référendaire rapporteur, M. Gillet, Mme Perony, conseillers, Mme Divialle, conseiller référendaire, M. Foerst, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Funck-Brentano, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. Z, de Me Foussard, avocat de la société Laboratoires Schwarz Pharma, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Z, engagé le 8 septembre 1997 par la société Laboratoires Schwarz Pharma en qualité de visiteur médical, a été licencié pour faute grave le 18 juillet 2000 ;
Sur les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen unique
Attendu que M. ... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour des motifs qui sont pris d'une violation de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, d'un défaut de base légale au regard de ce texte et d'une méconnaissance des règles de preuve ;
Mais attendu, d'abord, qu'il est permis à l'employeur, dans l'intérêt de l'entreprise et dans l'exercice de son pouvoir d'individualisation des mesures disciplinaires, de sanctionner différemment des salariés qui ont participé à une même faute ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel qui, sans inverser la charge de la preuve, a retenu que le salarié, visiteur médical, avait présenté à son employeur une fausse facture en vue de se faire rembourser des frais de repas qu'il n'avait pas engagés dans l'intérêt du laboratoire et avait persisté dans ses dénégations lors de l'entretien préalable mettant ainsi en cause la probité des médecins contactés, a pu décider que le comportement du salarié était fautif ; que le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, n'est pas fondé ;
Mais sur la première branche du moyen
Vu les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;
Attendu que pour juger le licenciement fondé sur une faute grave, la cour d'appel a retenu que le salarié, visiteur médical, avait présenté à son employeur une fausse facture en vue de se faire rembourser des frais de repas d'un montant de 71,57 euros, correspondant à un déjeuner pris le 9 juin 2000, avec deux médecins, qu'il n'avait pas engagés dans l'intérêt du laboratoire et avait persisté dans ses dénégations lors de l'entretien préalable mettant ainsi en cause la probité des médecins contactés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le fait occasionnel reproché au salarié, qui n'avait jamais fait l'objet de reproches pour des faits similaires, et la modicité du préjudice causé au laboratoire ne caractérisent pas un comportement rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a retenu une faute grave à la charge du salarié et l'a débouté en conséquence de ses demandes en paiement d'indemnité de préavis, d'indemnité de licenciement et de salaires retenus pendant la mise à pied, l'arrêt rendu le 6 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société Laboratoires Schwarz Pharma aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Laboratoires Schwarz Pharma à payer à M. Z la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille cinq.