Cass. soc., 25-02-2004, n° 01-47.104, inédit, Rejet



SOC.PRUD'HOMMESS.L

COUR DE CASSATION

Audience publique du 25 février 2004

Rejet

M. LE ROUX-COCHERIL, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président

Arrêt n° 411 F D

Pourvoi n° W 01-47.104

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par la société Casino cafétaria, société par actions simplifiées, dont le siège est Saint-Etienne,

en cassation d'un arrêt rendu le 16 octobre 2001 par la cour d'appel de Montpellier (chambre sociale), au profit de M. Patrick Y, demeurant Yzosse, défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 14 janvier 2004, où étaient présents M. Le Roux-Cocheril, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Mazars, conseiller rapporteur, M. Barthelemy, conseiller, Mmes Bourgeot, Auroy, Bouvier, conseillers référendaires, M. Collomp, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mazars, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de la société Casino cafétaria, de la SCP Roger et Sevaux, avocat de M. Y, les conclusions de M. Collomp, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique

Attendu que M. Y a été engagé le 1er juin 1988 en qualité de chef de zone par la société La Ruche Méridionale ; qu'à la suite de la reprise de cette entreprise par la société Casino Cafétéria, il a été nommé directeur d'une cafétéria à Carcassonne, selon contrat de travail du 1er janvier 1991, prévoyant une clause de mobilité ; que par lettre du 1er décembre 1994, son employeur l'a informé de sa mutation comme directeur d'une autre cafétéria de la même ville ; que le salarié, estimant que cette affectation dans une cafétéria moins importante modifiait son contrat de travail, l'a refusée ; qu'il a été licencié pour faute grave ; qu'il a alors saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 octobre 2001) d'avoir décidé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné au paiement des indemnités de préavis et de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen

1°) que la mutation du salarié en application d'une clause de mobilité relève du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en l'espèce, la mutation de M. Y ayant été effectuée en application de la clause de mobilité incluse dans le contrat de travail ; et le salarié prétendant que sa mutation constituait une mutation-sanction s'accompagnant d'un déclassement, il lui incombait de rapporter la preuve de ses allégations ; qu'en retenant que la rémunération de M. Y dépendait de l'importance de l'établissement dont il assurait la direction et que la société Casino ne versait aucun justificatif concernant l'importance de l'établissement sur lequel elle voulait muter M. Y, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé, en conséquence, les articles 1315 du Code civil et L. 122-14-3, L. 122-6 et L. 122-8 du Code du travail ;

2°) qu'en se bornant, pour juger légitime le refus du salarié d'accepter son changement d'affectation, à retenir que la mutation de M. Y de la cafétéria de Carcassonne-Salvaza à la cafétéria de Carcassonne-Rallye était susceptible de modifier son salaire et de porter atteinte au contrat de travail lui-même sans constater qu'à la cafétéria de Carcassonne-Rallye, M. Y n'aurait pas conservé certains des avantages qui étaient les siens à la cafétéria de Carcassonne-Salvaza et notamment, que sa rémunération aurait été modifiée, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard des articles L. 122-14-3 et L. 122-6 du Code du travail ;

3°) que la cour d'appel, pour juger que la mutation du salarié était susceptible de modifier son salaire, a énoncé que M. Y était classé "cadre en position A2" pour un coefficient 350 sur un poste correspondant à un "directeur de cafétéria importante", que son contrat de travail stipule en son article 3 qu'il percevra une "indemnité spéciale", que l'avenant cadre du 13 mai 1993 [il s'agit de l'avenant cadre du 01/03/1983 et non du 13/05/1993 comme mentionné par erreur dans l'arrêt] à la convention collective rappelle en son article 1 que la rémunération des cadres est fixée en fonction des responsabilités qu'ils assument ; que ces motifs ne sont pas de nature à démontrer que M. Y aurait subi une perte de salaire dans sa nouvelle affectation ; qu'ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, appréciant les éléments qui lui étaient soumis par les parties, a constaté, d'une part, que la rémunération des cadres était fixée en fonction des responsabilités qu'ils assument et, d'autre part, que le changement d'établissement, fût-ce pour y exercer les fonctions de directeur dans la même ville, était de nature à modifier son salaire ; qu'elle a ainsi pu décider que le refus du salarié n'était pas fautif ;

PAR CES MOTIFS

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Casino cafétaria aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Casino cafétaria à payer à M. Y la somme de 2 200 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille quatre.