SOC.
PRUD'HOMMES JL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 24 avril 2003
Cassation partielle partiellement sans renvoi
M. CHAGNY, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président
Pourvoi n° C 00-45.404
Arrêt n° 1122 F D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par Mme Pascale Z, demeurant Le Lavandou,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 juin 2000 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre sociale), au profit des Établissements Clean Services, dont le siège est La Londe les Maures, défendeur à la cassation ;
Les Établissements Clean Services ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 26 février 2003, où étaient présents M. Chagny, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Lebée, conseiller référendaire rapporteur, M. Bailly, conseiller, M. Frouin, Mme Farthouat-Danon, conseillers référendaires, M. Duplat, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Lebée, conseiller référendaire, les conclusions de M. Duplat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme Z, embauchée le 25 octobre 1995 par la société Clean Services, en qualité d'agent de propreté à temps partiel, a, par lettre du 27 avril 1997, fait parvenir à l'employeur une réclamation concernant le remboursement de ses frais de déplacements et ses heures de travail, annonçant qu'elle cesserait le travail en l'absence de règlement ; que le 3 mai 1996, elle adressait une nouvelle réclamation ; qu'elle a saisi le 8 juillet 1996 le conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de rappel de salaires et d'indemnités et s'est inscrite à l'ANPE le 15 août 1996 ; qu' elle a été licenciée le 11 octobre 1996 pour faute grave, l'employeur invoquant une absence injustifiée ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par l'employeur
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique du pourvoi formé par la salariée
Vu les articles L. 122-4 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Attendu que la cour d'appel énonce que la rupture du contrat de travail n'est pas imputable à l'employeur et que la salariée doit être déboutée de ses demandes d'indemnité de préavis et de dommages-intérêts ;
Attendu, cependant, que lorsque l'employeur et le salarié sont d'accord pour admettre que le contrat de travail a été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de la rupture, il incombe au juge de trancher le litige en disant quelle est la partie qui a rompu ; qu'à défaut d'une démission claire et non équivoque d'un salarié, il est impossible de lui imputer la rupture et que l'employeur, qui ne verse pas les rémunérations dues à leur échéance, provoque la rupture du contrat de travail qui s'analyse en un licenciement ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle n'avait pas relevé de démission claire et non équivoque de la salariée, et qu'elle avait condamné l'employeur à payer à la salariée des rappels de salaire et des remboursements de frais afférents à plusieurs mois de travail, ce dont il résultait que celui-ci avait manqué à ses obligations et que la rupture s'analysait en un licenciement, la cour d'appel a méconnu son office et violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant partiellement sans renvoi, de mettre partiellement fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes relatives à la rupture, l'arrêt rendu le 22 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que la rupture s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;
Renvoie afin qu'il soit statué sur les conséquences de la rupture ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille trois.