SOC.
PRUD'HOMMESC.B.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 18 décembre 2001
Rejet
M. SARGOS, président
Pourvoi n° Y 98-46.160
Arrêt n° 5309 FS P RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société Colirail, société anonyme dont le siège est Ivry-sur-Seine Cedex,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 octobre 1998 par la cour d'appel de Paris (18e Chambre, Section E), au profit de M. Michel Y, demeurant Pontoise,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 novembre 2001, où étaient présents M. Sargos, président, Mme Lemoine Jeanjean, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Le Roux-Cocheril, Brissier, Finance, Texier, Mme Quenson, conseillers, M. Poisot, Mmes Maunand, Bourgeot, MM. Soury, Liffran, Besson, Mmes Duval-Arnould, Nicolétis, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Lemoine Jeanjean, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Colirail, les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. Y, chef chauffeur au service de la société Colirail depuis février 1993, a été licencié en raison de son "refus des nouveaux horaires proposés compte tenu d'une nouvelle organisation" ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur le premier moyen
Attendu que la société Colirail fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 16 octobre 1998) de ce que, selon ses mentions, la greffière aurait été incluse dans la composition de la Cour et dans le délibéré ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêt que la greffière, qui faisait partie de la juridiction, ait assisté au délibéré ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
Attendu que l'employeur reproche à l'arrêt de le condamner à payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen
1°/ que le refus par le salarié d'un changement dans les conditions d'exécution de son contrat de travail, décidé par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire une faute grave ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le changement des horaires du salarié, expressément prévu par le contrat de travail, ne constituait pas une modification de son contrat de travail ; qu'en condamnant l'employeur à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
2°/ que l'employeur expliquait que le changement d'horaires du salarié était justifié par la nécessité d'affecter un responsable des chauffeurs au service du soir afin d'obtenir une meilleure efficacité de l'exploitation ; qu'en retenant, pour condamner l'employeur à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la modification de l'organisation du matin n'était pas justifiée, sans rechercher si le changement d'horaires n'était pas fondé sur la recherche d'une meilleure efficacité de l'exploitation par la désignation d'un responsable des chauffeurs du soir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 213-2 du Code du travail, "tout travail entre 22 h et 5 h est considéré comme travail de nuit" ; qu'il résulte de l'arrêt que l'employeur entendait substituer à un horaire de travail de 5 hà 13 h un travail de 16 hà 0 h, en sorte qu'il devait obtenir l'accord du salarié pour cette modification du contrat de travail, nonobstant la clause de variabilité des horaires qui ne pouvait avoir pour effet de permettre à l'employeur d'imposer une telle modification ; que le seul refus de la modification du contrat de travail ne pouvant constituer une cause de licenciement, l'arrêt attaqué se trouve, par ce motif de pur droit, substitué, légalement justifié ; que le moyen ne saurait être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Colirail aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Colirail à payer à M. Y la somme de 5 000 francs ou 762,25 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille un.