ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
21 Mai 1992
Pourvoi N° 91-40.026
Delussu
contre
SA Vetra
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Antonio ..., demeurant 29, rue des Pyrénées, Saint-Pierre-les-Nemours (Seine-et-Marne), en cassation d'un arrêt rendu le 26 octobre 1990 par la cour d'appel de Paris (21e chambre C), au profit de la société Vetra, société anonyme dont le siège social est à Vernou-La-Celle-sur-Seine (Seine-et-Marne), défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 mars 1992, où étaient présents
M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Marie, conseiller référendaire rapporteur, M. ..., Mme ..., conseillers, M. Monestié, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Marie, conseiller référendaire, les observations de la SCP Masse-Desen, Georges et Thouvenin, avocat de M. ..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Vetra, les conclusions de M. Monestié, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. ..., embauché en qualité de contremaître le 1er octobre 1978 par la société Vétra, a été licencié le 13 septembre 1988 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes en rappel de salaire et en indemnité de rupture, aux seuls motifs que les moyens des parties ont fait l'objet d'une analyse particulièrement étudiée et d'appréciations justifiées tant en fait qu'en droit, et ce, avec des motifs qui répondent exactement aux moyens de l'appel et que la cour d'appel adopte ;
alors que toute décision doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens ;
que la cour d'appel, qui se borne à affirmer que les motifs adoptés des premiers juges répondaient exactement aux moyens de l'appel, lesquels n'ont fait l'objet d'aucun exposé, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a donné des motifs à sa décision en adoptant ceux du jugement qu'elle a confirmé ;
que le moyen manque en fait ;
Sur le deuxième moyen
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir débouté le salarié de sa demande en paiement de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, alors que les dispositions légales sur la rémunération des heures supplémentaires de travail sont d'ordre public ; qu'en se contentant d'affirmer, pour débouter un salarié de sa demande en paiement des heures supplémentaires effectuées pendant cinq ans au titre du ramassage journalier des ouvriers, que l'usage d'un véhicule tous frais payés constituait un avantage important compensant l'allongement de la durée du travail sans chiffrer les sommes dues au titre des heures supplémentaires et celles reconnues au titre de l'avantage en nature, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 212-5 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, par motifs adoptés, a fait ressortir que le temps consacré au ramassage d'autres salariés était imputé sur le temps du trajet ;
qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Mais sur le troisième moyen
Vu l'article L 122-8 du Code du travail ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en complément d'indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel a énoncé que cette indemnité doit être calculée sur le salaire et les avantages nets des trois derniers mois ;
Attendu cependant que l'indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au salaire brut, assujetti au paiement par l'employeur des cotisations sociales, que le salarié aurait reçu s'il avait travaillé pendant la durée du délai-congé ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le quatrième moyen
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu qu'est un licenciement pour motif économique celui qui résulte d'une suppression, de transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ;
Attendu, selon la procédure, que M. ... avait été licencié en raison de la suppression de son emploi de contremaître et que des chefs d'équipe avaient été embauchés aussitôt après son départ ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les juges du fond ont relevé que les postes offerts à l'embauche avaient une qualification moindre ;
Attendu, cependant, que dans le cadre de son obligation de reclassement dans l'entreprise, l'employeur doit, en cas de suppression ou de transformation d'emplois, proposer aux salariés concernés, des emplois disponibles de même catégorie, ou, à défaut, de catégorie inférieure, fût-ce par voie de modification substantielle des contrats de travail ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
d CASSE ET ANNULE, mais seulement des chefs de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 26 octobre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;s, par la cour d'appel de Paris remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Vetra, envers M. ..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;